L’art au service des émotions, interview de Chloé Chaumat

Chloé Chaumat est étudiante en Design à Strate Lyon. Sa mère l’a poussée dans des cours d’art et de dessin depuis petite et, après avoir collé des souvenirs dans des carnets qu’elle avait créés, elle a choisi la voie du design graphique. Ce n’est pas elle qui appelait à l’art mais l’art qui l’appelait. Aujourd’hui, elle voue ses journées au design et collabore parfois avec des rappeurs.

Quelles sont tes inspirations ?

« Je m’inspire des sons que j’écoute (du rap), des travaux que je vois sur internet, dans la rue, des étudiants de Strate, des travaux de mes parents (ma mère fait de la lino-gravure, mon père des affiches de groupes de musique). »

Comment définir ton style ?
Cover de l'album Aurevoir, Enchanté de Hellas et Layton. Collage, montage, dessin (2025)

« Mon style change et évolue chaque jour, comme tout le monde. Je pense que je n’atteindrais jamais « mon style », ou alors je l’atteins depuis toujours. Mon style c’est ce qui me représente sur le moment où je fait la création, ce que je ressens sur le moment, ce que j’ai voulu représenter et comment. Le plus important pour moi c’est que j’arrive, en voyant le dessin, à me souvenir de ma propre histoire qui était derrière, mais aussi de ressentir à nouveau les émotions qui m’avaient traversées sur le moment.

J’opte donc souvent pour des techniques contrastées et importantes, souvent en noir et blanc, et surtout, il y a une dimension spirituelle. Je veux pousser ceux qui le regarde à réfléchir et à s’y identifier, à y attacher leurs propres histoires. Jamais quelqu’un n’y verra le même dessin que celui que j’ai dessiné. Ils y verront chacun une reflexion de leur propre histoire et leurs propres souvenirs.

En un mot je dirais que mon style est introspectif. »

Qu’est ce que ça t’apporte de créer ?

« Dès que les choses n’allaient pas, ça a été mon moyen de mettre mes émotions sur papier. Comme tout le monde. Peut-être que vous ne faites pas tous des petits dessins, des affiches ou des livres, mais vous avez tous une activité sur laquelle vous sautez dans les moments de blues.

Aujourd’hui ça arrive même à m’apporter de la satisfaction. Je vois où cet art me mène, je vois les gens que ça touche. Je me dis que j’arriverai peut-être à en vivre un jour. »

Pour toi, quels arts se concilient avec le design ?
Affiche sur HjeuneCrack en collaboration avec @anselme_san. Dessin et montage (2025)

« Tous les arts se mêlent avec le design graphique, tout comme n’importe quel art peut se lier aux autres. J’adore créer en me basant sur des sons, parce que je me retrouve souvent dans les paroles de certains rappeurs. Dans certaines musiques, j’ai l’impression d’écouter mes propres souvenirs.

C’est pour cette raison que j’ai travaillé avec un rappeur récemment. Je me retrouvais dans certains de ses mots, et ça a été naturel pour moi d’illustrer toutes ces paroles sur papier. »

L’art doit-il être utile ?

« L’art doit-il être utile ? L’art est systématiquement utile, tout comme l’art est partout à mon sens. L’art sera utile, qu’il questionne des sujets politiques, sociaux ou juste personnels, il y aura toujours le reflet de chaque personne dans leur vision de l’œuvre. L’atout principal de l’art est la manière dont on voit notre reflet dedans. Ça permet de ne jamais se perdre, dans des moments où on a l’impression de s’oublier, de ne plus trop savoir ce que l’on fait ici, on se retrouve rassurés et compris en voyant une œuvre et en imaginant ce que l’artiste à voulu transmettre. Ou ce que l’on y voit. »

Où te vois-tu dans 10 ans ?
Illustration au feutre en pointillisme (2025)

« Je me vois toujours dessiner et contente de le faire. J’aimerais mêler dessin, graphisme et tatouage dans l’idéal. Je m’imagine travailler pour des artistes un peu partout. J’ai vite vu avec le temps que je n’aimais pas passer trop de temps sur le même projet. C’est pourquoi j’aimerais trouver une double activité comme le tatouage en plus du graphisme. Mais les deux resteraient étroitement liés pour que je puisse garder un fil conducteur dans mon expression artistique. »

On voit souvent un oeil dans tes productions, qu’est ce qu’il  représente ?

« C’est mon oeil. Ce que je cherche à représenter, c’est un regard. Au début, c’était parfois un regard déçu, triste. Mais avec ce regard illustré, chacun peut y voir l’émotion qu’il veut, un sentiment qui le reflète dans la scène qu’il s’imagine. Les regards parlent plus que les mots. Je trouve cette idée derrière les regards fascinante et je pense — même si j’ai la lassitude facile — que je m’en passionnerais toujours. »

Animation en linogravure, stickers, tissage de papier (2024)

Les illustrations de Chloé Chaumat sont disponibles sur son compte Instagram @soleildansleaufroide et sur le compte Instagram de PUNCH ! @punch_onlinemag.

Zélie Bleton Pascal 

Crédit illustrations : Chloé Chaumat